第一天:2010 1 12

海地時間一月十二號十六點五十三分的時候(巴黎時間二十二點五十三分,台北時間一月十三號清晨五點五十三分),在太子港 (Port-au-Prince) 西方約十二公里處發生了芮氏規模七點零的大地震。

第二天:2010 1 13

 

Haïti dévasté après un violent tremblement de terre

LE MONDE | 13.01.10 | 14h03  •  Mis à jour le 13.01.10 | 14h03

Saint-Domingue Correspondant

Le tremblement de terre qui a dévasté Haïti mardi 12 janvier en fin d'après-midi a été d'une extrême violence. Selon l'Institut américain de géophysique, le pays n'avait pas subi une secousse d'une telle puissance depuis le milieu du XVIIIe siècle. Selon les premières estimations de responsables d'ONG, la catastrophe pourrait avoir causé des milliers de morts dans cet Etat parmi les plus pauvres du monde.

De nombreux édifices ont été détruits dans la capitale, Port-au-Prince, plongée dans une situation chaotique. Les rues de la ville sont jonchées de cadavres, et les pillards se sont vite mis à l'oeuvre dans les supermarchés dévastés. Et les inquiétudes étaient fortes concernant la situation de Cité Soleil, l'un des principaux bidonvilles, situé au nord de la capitale (300 000 habitants).

Les communications téléphoniques et l'électricité ont été coupées, ajoutant à la panique générale. La plupart des stations de télévision ne fonctionnent plus et quelques rares radios émettent des appels d'urgence. L'acheminement des blessés dans les hôpitaux encore debout est rendu quasiment impossible. Les survivants erraient dans la capitale, préférant passer la nuit dehors de peur d'un nouveau séisme. Utilisant des lampes torches, beaucoup se mobilisaient pour déblayer les décombres et porter secours aux personnes ensevelies.

L'épicentre de la première secousse, de magnitude entre 7 et 7,3, a eu lieu à 16 h 53 (21 h 53 GMT) dans la banlieue de Carrefour, à 15 kilomètres à l'ouest de la capitale surpeuplée. Elle a été suivie de plusieurs répliques, qui ont prolongé l'affolement des habitants. La violence du séisme a été telle qu'il a été ressenti vers l'ouest jusqu'à Santiago de Cuba et vers l'est sur une grande partie du territoire dominicain. Lancée dans les minutes qui ont suivi le tremblement de terre, une alerte au tsunami a été levée en début de soirée. Les autorités dominicaines n'ont fait état d'aucune victime ni d'aucun dégât majeur.

De nombreux bâtiments, dont le palais national, plusieurs ministères, le Parlement, la cathédrale, le palais de justice, des établissements universitaires, des centres hospitaliers se sont écroulés, selon les témoignages de journalistes haïtiens joints au téléphone. Selon le frère du premier ministre, Jean-Max Bellerive, le président René Préval, son épouse Elisabeth Delatour et tous les membres de son gouvernement seraient sains et saufs.

Plusieurs des principaux hôtels de la capitale, comme le Montana, ont également été détruits. 200 personnes qui y résidaient seraient portées disparues. Installé à l'Hôtel Christopher, le quartier général de la Mission de stabilisation des Nations unies en Haïti (Minustah) a souffert d'importants dégâts. La Minustah compte quelque 9 000 policiers et militaires qui participaient aux secours dès mercredi à l'aube. Evoquant "une catastrophe majeure", l'ambassadeur d'Haïti à Washington, Raymond Joseph, a lancé un appel urgent à l'aide internationale au micro de la chaîne de télévision CNN. Le président américain Barack Obama a rapidement annoncé l'envoi de "toute l'aide nécessaire" dont Haïti aura besoin. Le commandement sud du Pentagone, basé à Miami, a été chargé d'évaluer les besoins et d'acheminer le plus vite possible l'aide humanitaire.

Le Canada, la France, le Venezuela et la République dominicaine ont également annoncé l'envoi de secours. Paris a décidé d'envoyer 130 sapeurs-pompiers ou sauveteurs, qui devaient rejoindre Port-au-Prince dès jeudi soir. Près de 1 500 Français résident en Haïti, dont 1 200 à Port-au-Prince. Selon le secrétaire d'Etat à la coopération Alain Joyandet, une soixantaine d'entre eux étaient réfugiés à l'ambassade.

La Banque interaméricaine de développement (BID) a débloqué une aide d'urgence de 200 000 dollars (138 000 euros) devant permettre de fournir de l'eau, des vivres, des médicaments et des abrix aux victimes. De son côté, la Banque mondiale, dont les bureaux situés dans la banlieue de Port-au-Prince ont été détruits , a indiqué qu'elle commençait à travailler sur des projets de reconstruction, et qu'elle était prête à mobiliser une aide sans en préciser encore le montant.

Le programme alimentaire mondial (PAM) a décidé de faire partir deux avions, son porte-parole expliquant "que la nourriture a une importance vitale surtout à partir des deuxième et troisième jours". L'ampleur de la mobilisation internationale sera cruciale dans ce pays dépourvu de tout pour secourir les victimes.

Jean-Michel Caroit et AFP

Le siège de l'ONU s'est effondré

Le siège de la mission de l'ONU en Haïti (Minustah), un bâtiment de cinq étages où plus de 200 fonctionnaires onusiens travaillent en temps normal, s'est effondré dans le tremblement de terre. Selon le chef des opérations de maintien de la paix de l'ONU, Alain Le Roy, il restait, à l'heure du séisme, aux alentours de 17 heures, "un grand nombre de personnes" et "il y a forcément des morts en nombre très important".

Des casques bleus brésiliens présents sur place essayaient sans succès, mardi soir, d'extraire des survivants. On était aussi sans nouvelles du chef de la Minustah, le diplomate tunisien Hédi Annabi. Selon des sources onusiennes, des casques bleus ont rapporté des actes de pillage. Le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon, s'est dit "très inquiet pour le peuple haïtien et les nombreux employés de l'ONU qui vivent sur place". La mission de l'ONU est composée de près de 11 000 personnes, dont 7 000 casques bleus et 2 000 policiers.

Article paru dans l'édition du 14.01.10

 

La secousse, la plus forte depuis plus de deux siècles, a surpris les spécialistes

LE MONDE | 13.01.10 | 14h03  •  Mis à jour le 13.01.10 | 18h50

Haïti joue de malchance. Le séisme dévastateur de magnitude 7 à 7,3 sur l'échelle de Richter, qui a frappé l'île mardi 12 janvier, est dû à une faille dont la période d'activité est sans doute de l'ordre de 250 à 300 ans. "Les deux derniers grands séismes qui ont touché la région remontent au milieu du XVIIIe siècle", dit Pascal Bernard, chercheur au laboratoire de sismologie de l'Institut de physique du globe de Paris (IPGP). Haïti joue de malchance, car outre la longue période de ce cycle d'activité - qui a pu faire "oublier" la sismicité de la région -, le tremblement de terre ne s'était annoncé par aucun signe précurseur discernable.

La faille qui a rompu traverse l'île d'est en ouest avec, schématiquement, deux plaques qui s'affrontent : la plaque caraïbe au sud et la plaque nord-américaine au nord. "C'est une faille d'environ 500 km de longueur, qui passe au sud de Port-au-Prince, explique M. Bernard. Elle a vraisemblablement cassé sur une longueur de 50 km." La sismicité de la zone est parfaitement connue, mais aucun signal d'alerte n'a pu être détecté par les géophysiciens.

"Les mesures GPS montrent que les deux plaques glissent l'une contre l'autre à une vitesse relative de 2 cm par an environ, dit Pascal Bernard. Ce qui signifie que depuis les derniers séismes, environ 5 mètres de déplacement des plaques se sont accumulés. La faille était parfaitement mûre pour un grand séisme." Cependant, ajoute le sismologue, "la faille n'a pas montré de microséismes précurseurs d'un grand tremblement de terre, comme c'est le cas en Turquie ou dans d'autres régions du monde".

Aléa sismique

En l'absence de ces microséismes, l'imminence du relâchement des énormes contraintes accumulées depuis les dernières grandes secousses n'était pas prévisible. Même si, pour les géologues, un événement qualifié d'imminent peut se produire d'une décennie à l'autre.

En Haïti, le non-repérage de signaux précurseurs est partiellement dû à l'absence de réseaux de détection locaux, l'absence d'observatoire sismologiques étant dû "à l'extrême dénuement du pays", comme le souligne M. Bernard. Cependant, les systèmes d'observations internationaux auraient été capables de détecter des microséismes locaux de magnitude 4 sur l'échelle de Richter, or cela n'a pas été le cas. "Cela veut dire que s'il y a eu des signaux précurseurs, ils ont été extrêmement faibles", décrypte le géophysicien. C'est donc sans prévenir et de manière singulière que le séisme a frappé. Des répliques sont-elles prévisibles ? "Une grande part de la faille est aujourd'hui intacte, et elle peut encore casser dans quelques années ou dans deux siècles", estime M. Bernard.

Pour toute la zone caraïbe, l'aléa sismique s'ajoute à un risque déjà grand de catastrophes naturelles. La région est en effet sur la route d'une part importante des cyclones tropicaux qui prennent naissance dans l'Atlantique et se dirigent vers le golfe du Mexique. La décennie écoulée a vu une activité cyclonique très importante - certains prévoyant une aggravation de ces phénomènes avec le changement climatique en cours. Entre mi-août et mi-septembre 2008, pas moins de quatre cyclones tropicaux ont dévasté l'île, détruisant les cultures et aggravant l'insécurité alimentaire. La saison cyclonique 2009 avait été plus clémente ; une maigre satisfaction ruinée par les caprices de la tectonique des plaques.

Stéphane Foucart

Article paru dans l'édition du 14.01.10

 

Les secours commencent à se diriger vers Haïti

LEMONDE.FR avec AFP et Reuters | 13.01.10 | 10h00  •  Mis à jour le 13.01.10 | 11h59

Mercredi matin, la sécurité civile a annoncé qu'un total de cent trente sapeurs-pompiers ou sauveteurs français auront rejoint la capitale haïtienne, Port-au-Prince, "au plus tard dans les vingt-quatre heures". Un énorme tremblement de terre de magnitude 7 a frappé mardi Haïti, non loin de Port-au-Prince, sa capitale surpeuplée, provoquant une "catastrophe majeure" dans le pays le plus pauvre des Amériques, selon les autorités.

Le ministre de l'intérieur, Brice Hortefeux, a décidé "d'y envoyer immédiatement deux détachements d'intervention catastrophe constitués de sapeurs-pompiers martiniquais et guadeloupéens et des sapeurs-sauveteurs des formations de la sécurité civile stationnées à Brignoles, dans le Var", selon un communiqué. Les présidents du conseil régional et du conseil général de Guadeloupe, Victorin Lurel et Jacques Gillot, ont appelé les maires de leur département à se mobiliser en faveur d'Haïti.

Deux avions français devaient s'envoler mercredi matin à destination de l'île afin d'apporter de l'aide et des vivres à la population touchée par le puissant séisme, a annoncé le secrétaire d'Etat à la coopération français. Quelque mille quatre cents Français vivent en Haïti, dont mille deux cents dans la capitale, a précisé Alain Joyandet sur Europe 1. Il a dit n'avoir aucune information concrète sur d'éventuelles victimes françaises. "Deux avions partent, l'un de Fort-de-France [Martinique, Ndlr] et l'autre de Marseille, avec une soixantaine de personnes à leur bord, moitié gendarmes, moitié sauveteurs, ainsi que des vivres", a-t-il dit.

L'administration américaine a précisé que le département d'Etat, la sécurité civile et l'armée américaine travaillaient à une évaluation de la situation et à la coordination de l'assistance nécessaire. Les Etats-Unis "vont fournir une aide civile et militaire aux catastrophes ainsi qu'une assistance humanitaire", a déclaré la secrétaire d'Etat, Hillary Clinton. L'agence américaine pour le développement international (USAID) va dépêcher sur place une équipe de soixante-douze personnes et de six chiens secouristes ainsi que 48 tonnes d'équipements de secours. Cette équipe sera accompagnée par des experts qui seront chargés d'évaluer la situation. Des secouristes taïwanais sont aussi en cours d'acheminement.

Dans la nuit, plusieurs groupes ont été créés sur Facebook pour venir en aide aux victimes, tandis que la star haïtiano-américaine du hip-hop Wyclef Jean a lancé un appel aux dons sur Twitter.

 

Le siège de l'ONU s'est effondré

Le siège de la mission de l'ONU en Haïti (Minustah), un bâtiment de cinq étages où plus de 200 fonctionnaires onusiens travaillent en temps normal, s'est effondré dans le tremblement de terre. Selon le chef des opérations de maintien de la paix de l'ONU, Alain Le Roy, il restait, à l'heure du séisme, aux alentours de 17 heures, « un grand nombre de personnes » et « il y a forcément des morts en nombre très important ».

Des casques bleus brésiliens présents sur place essayaient sans succès, mardi soir, d'extraire des survivants. On était aussi sans nouvelles du chef de la Minustah, le diplomate tunisien Hédi Annabi. Selon des sources onusiennes, des casques bleus ont rapporté des actes de pillage. Le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon, s'est dit « très inquiet pour le peuple haïtien et les nombreux employés de l'ONU qui vivent sur place ». La mission de l'ONU est composée de près de 11 000 personnes, dont 7 000 casques bleus et 2 000 policiers.

Article paru dans l'édition du 14.01.10

 

Cyclones, émeutes de la faim… un pays qui vit au rythme des crises

LE MONDE | 13.01.10 | 11h03  •  Mis à jour le 13.01.10 | 18h52

Saint-Domingue, correspondant

Le séisme qui a frappé Haïti, mardi 12 janvier, touche l'un des pays les plus pauvres du monde, déjà mis à l'épreuve en 2008 par une série de cyclones. Plusieurs centaines de personnes avaient péri. La destruction des routes, des maisons et des infrastructures économiques avaient alors été chiffrée à près de 15% de la richesse nationale.

En 2008, Haïti avait aussi été un des pays les plus affectés par le renchérissement mondial des prix des matières premières et du pétrole. De violentes émeutes de la faim avaient secoué la capitale Port-au-Prince et d'autres villes de province, provoquant la chute du gouvernement du premier ministre Jacques-Edouard Alexis et le ralentissement des décaissements de l'aide internationale dont le pays reste très dépendant.

La liste des peines devait encore s'allonger avec la crise financière internationale. Non que celle-ci ait affecté directement ce pays peu intégré à l'économie mondiale, mais les flux d'argent envoyés par les Haïtiens émigrés aux Etats-Unis et au Canada se sont contractés.

12000 Haïtiens quittent chaque année leur pays, selon un récent rapport du Programme des Nations unies pour le développement (PNUD) qui souligne le rôle vital de l'émigration. En 2008, 1,8 milliard de dollars (1,24milliard d'euros) ont été rapatriés dans le pays grâce aux migrants, deux fois plus que l'aide internationale.

CONTEXTE POLITIQUE INSTABLE

2009 avait marqué un certain retour à la normale avec l'amélioration de la production agricole et la reprise des exportations de textiles. La croissance s'était légèrement redressée (environ 2%) et l'inflation avait fortement baissé (5,1%). Sans permettre de faire reculer la pauvreté dans ce pays où 76% de la population survit avec moins de 2 dollars (1,3 euro) par jour.

En 2009, Haïti est passé du 146e au 149e rang - sur 182 pays - du classement du développement humain dressé par le PNUD. Les récoltes plus abondantes ont toutefois fait baisser le nombre de Haïtiens en situation "d'insécurité alimentaire" de 3,3millions fin 2008 à 1,9million.

Les principaux bailleurs de fonds ont annulé 930 millions d'euros de créances, plus de 70% de la dette extérieure et se sont engagés à fournir 216 millions d'euros sur deux ans pour financer le plan de réduction de la pauvreté du gouvernement. Ses priorités sont la création d'emplois dans les travaux d'infrastructure, la relance de l'agriculture, la santé, l'éducation et la protection de l'environnement.

Ce séisme intevient dans un contexte politique instable alors que des élections, législatives puis présidentielle, doivent avoir lieu cette année. La premier ministre, Michèle Pierre-Louis, a été destituée fin octobre 2009 par un vote de censure du Sénat et remplacé par Jean-Max Bellerive, le ministre de la coopération du gouvernement sortant.

Ce remaniement est intervenu après des élections partielles contestées au printemps 2009. Les relations avec la République dominicaine voisine se sont dégradées à la suite de l'assassinat de plusieurs sans-papiers haïtiens.

Le secrétaire général des Nations unies, Ban Ki-moon, et la secrétaire d'Etat américaine, Hillary Clinton, se sont rendus dans l'île dernièrement. Le mandat de la mission de stabilisation des Nations unies en Haïti (Minustah) comptant 7000 militaires et 2000 policiers a été prolongé d'un an à la mi-octobre.

Jean-Michel Caroit

Article paru dans l'édition du 14.01.10

 

A Jacmel, "on vient de retirer 35 corps des décombres"

LEMONDE.FR | 13.01.10 | 19h04  •  Mis à jour le 14.01.10 | 12h21

Alors que les secours s'organisent progressivement en Haïti, des témoignages nous sont parvenus de Port-au-Prince, mais aussi de Pétionville et de Jacmel. Français ou Haïtiens, tous décrivent leur nuit, racontent l'horreur de villes en plein chaos. Nous livrons leur récit brut. Les communications téléphoniques demeurent extrêmement difficiles à établir.

  • "Ils viennent de retirer 35 corps des décombres d'une école", Florian Delerue à Jacmel

Ici aussi les dégâts sont extraordinaires, toute une partie de la ville est détruite. Ils viennent de retirer 35 corps des décombres d'une école. Beaucoup d'établissements sont tombés. La ville a retenu son souffle toute la nuit alors que les répliques et les secousses se faisaient encore sentir. Nous avons tous dormi dans la rue, avec quelques draps. La Minustah [mission des Nations unies pour la stabilisation en Haïti] a mis en place un premier campement d'urgence sur la piste du petit aéroport local. L'hôpital principal Saint-Michel est très touché. J'ai emprunté aujourd'hui la route de Port-au-Prince à moto, à la recherche de la mère d'un ami. Elle va bien, mais je suis passé dans une petite localité de Tom Gato : toutes les maisons qui longent la route sont en ruine. La chaussée ne s'est pas effondrée, mais les éboulements sont impressionnants. La route va sûrement rester coupée longtemps. Beaucoup de zones sont dans un état apocalyptique : Port-au-Prince, Gressier, Léogane et l'ouest du département du Sud-Est, dont Jacmel.

Les autorités n'arrivent pas à faire le décompte des blessés et cadavres. Tous les hôtels, stations de service et résidences sont détruits à 70 %. Les malades affluent vers la base des Nations unies, alors qu'il n'y a qu'un médecin et deux infirmiers sri-lankais. Quelques médecins cubains et haïtiens s'efforcent de soigner les cas les plus graves. Ils manquent de tout : médicaments, matériel, ressources humaines. Les blessés sont accueillis dans la cour de l'hôpital, allongés à même le sol et immédiatement couverts de mouches. Leur corps endolori côtoie les cadavres des personnes moins chanceuses. Les rescapés, eux, dorment en pleine rue car les répliques sont ressenties toutes les trente minutes en moyenne. Beaucoup de gens sont encore coincés sous les décombres. Il faudrait que la communauté internationale s'active rapidement pour les sauver étant donné que les autorités haïtiennes, déjà bloquées au niveau de Port-au-Prince, n'ont aucuns moyens et qu'aucun plan de gestion des désastres n'a été établi.

Notre bureau se situe dans le quartier de Paco, en plein centre-ville. Dès que les murs ont commencé à trembler, nous nous sommes précipités dehors. Dans la rue, les maisons ont commencé à se fissurer, puis plusieurs bâtiments se sont effondrés. Des dizaines de blessés affluaient de partout dans des états plus ou moins graves. Certains se sont mis à prier, d'autres dévalisaient les magasins.

Aujourd'hui, la plupart des gens cherchent à joindre leurs proches. L'heure est au décompte. Il y a d'énormes embouteillages à cause des éboulements. L'électricité n'a pas été complètement rétablie et il n'y a plus d'eau courante parce que les pompes à eau sont en rade. Je sais que des groupes de médecins essaient de s'organiser pour secourir les blessés. Plusieurs hôpitaux de la ville ont été touchés et nous attendons avec impatience l'arrivée des équipes d'urgence envoyées de France.

Dans le quartier, plusieurs épiceries ont également été détruites. Nous n'avons rien mangé depuis hier soir. Avec d'autres, nous allons essayer de rejoindre la résidence de l'ambassade de France. Nous devrions y passer la nuit. Pour l'instant, les rues sont calmes. Les gens pleurent et attendent.

  • "A Port-au-Prince, toutes les maison ont été touchées", Carel Pedre, animateur radio à Port-au-Prince

Son témoignage a été publiée par Les Observateurs de France 24.

  • "L'aéroport était noyé sous un nuage de poussière", Daniel Locoro, 67 ans, ingénieur civil à Port-au-Prince

J'étais à l'aéroport quand s'est produite la première secousse. En partance pour Paris via Air Caraïbes, ma femme et moi venions d'atteindre la salle d'embarquement. Nous étions assis au fond, près du mur. Je me suis levé pour embarquer quand, tout à coup, les chaises se sont mises à bondir. Je me suis accroché au mur, mais impossible de tenir debout. La lumière s'est éteinte, et le faux plafond nous est tombé dessus. Ma femme et d'autres personnes priaient. J'ai cherché du regard un endroit où nous abriter. Il y avait cette poutre épaisse au plafond. Nous sommes restés dessous jusqu'à ce que ça se calme. Au bout d'une minute, le sol a cessé de trembler et j'ai tiré ma femme vers la sortie. Dans l'aéroport, les gens hurlaient. La foule avait pris d'assaut les portes. Nous avons à peine eu le temps de faire 20 mètres puis la seconde secousse s'est produite. C'était terrible. Au-dessus de moi, j'ai aperçu des gens qui s'écroulaient, frappés par des débris tombés des murs ou du plafond. Avec ma femme, nous avons miraculeusement réussi à sortir en courant, évitant les morceaux de béton qui pleuvaient çà et là.

L'aéroport était noyé sous un nuage de poussière. Les gens pleuraient, tout le monde cherchait des parents, des proches. Les nouvelles que nous entendions grâce aux postes radio des policiers étaient terribles : le palais national en partie détruit, des dizaines de bâtiments effondrés... J'essayais de garder mon calme jusqu'à ce que je me rende compte qu'aucune voiture ne circulait dans les environs. J'ai pensé que c'était mauvais signe. Nous avons attendu quatre heures, assis devant l'aéroport, subissant toutes les deux ou trois minutes une réplique terrifiante du tremblement. Tous les vols en partance de Port-au-Prince ont été annulés.

Impossible d'appeler une voiture pour qu'on vienne nous chercher. Les communications téléphoniques étaient coupées. Finalement, j'ai réussi à joindre quelqu'un. Le conducteur avait l'air paniqué. Il nous parlait de maisons effondrées, de scènes horribles, de destruction. Le long de la route que nous avons prise pour rejoindre les hauteurs de Port-au-Prince, les gens couchaient dehors à même le sol. J'ai aperçu des familles qui essayaient de déterrer leurs proches et leurs amis. Nous arrivions difficilement à avancer. Les ruines des maisons écroulées bloquaient le passage. Le sol continuait de trembler.

Nous avons mis une heure pour rejoindre Pétionville. Le spectacle sur place est effroyable. Les dégâts sont terribles. Une épicerie que je fréquente est littéralement coupée en deux. Les voitures ont été écrasées par des pans de mur tombés des maisons. Les gens sont hagards. Ils traînent dans la rue. Chez moi, l'accès au garage est bloqué par les débris d'un mur. Je n'ai toujours pas de téléphone. Le jour se lève sur Port-au-Prince. D'où je suis, j'aperçois la ville couverte d'un lourd nuage de poussière. Toute ma famille est saine et sauve. Des hélicoptères survolent les environs. La journée va être dure.

  • "Jamais une minute ne m'avait paru aussi longue", Francis Hilaire, 67 ans, expert-comptable vivant à Thomassin

Nous étions chez nous en famille quand le sol s'est mis à trembler. Jamais une minute ne m'avait paru aussi longue. C'était réellement inimaginable. Comme un cyclone qui s'abat, mais sans vent, sans bruit. Dans notre quartier, les dégâts sont minimes. La maison est à une quinzaine de kilomètres du centre-ville de Port-au-Prince, dans les hauteurs de Pétionville. Nous avons ressenti plusieurs répliques, mais le bâtiment a tenu bon.

Immédiatement après la première secousse, des dizaines de personnes se sont précipitées vers le terrain de football qui se trouve à côté de l'église. La plupart d'entre elles ont passé la nuit dehors, de peur d'être ensevelies en cas de réplique violente. Impossible d'avoir des nouvelles de mes amis à Port-au-Prince, toutes les lignes de téléphone étaient saturées ou coupées. Une seule station de radio haïtienne a continué à diffuser pendant la soirée et, à partir de 21 heures, nous sommes passés sur RFI. La télévision et le câble ne marchent pas. Heureusement, Internet fonctionne. J'attends toujours de pouvoir me rendre à Port-au-Prince pour en savoir plus.

A l'heure où nous parlons, le jour se lève et j'aperçois les gens rassemblés sur le terrain de football qui s'éveillent et commencent à rentrer chez eux. Quelques murs sont tombés, mais les maisons tiennent toujours debout. Par contre, beaucoup de voisins qui travaillent dans la capitale ne sont pas revenus de la nuit. Nous sommes très inquiets.

Propos recueillis par Elise Barthet
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